De plus en plus de salariés aspirent à un changement radical dans leur parcours professionnel. La rupture conventionnelle apparaît comme un levier pertinent pour se libérer d’un contrat CDI sans entrer en conflit avec son employeur. Mais comment procéder pour demander cette formule et entamer une reconversion ? Quels arguments mettre en avant ? Quelles démarches suivre ? Voici un tour d’horizon complet afin de préparer sereinement cette transition et donner un nouveau tournant à sa carrière.
Comment demander une rupture conventionnelle pour débuter une reconversion professionnelle ?

1. Comprendre la rupture conventionnelle et ses avantages
Une solution à l’amiable pour quitter son emploi
La rupture conventionnelle a été introduite dans le droit du travail français comme une voie permettant à un salarié et à son employeur de se séparer par un accord commun. Elle offre un cadre légal pour mettre fin à un CDI sans passer par un licenciement ou une démission.
1.1. Comment fonctionne la rupture conventionnelle ?
• Elle se négocie entre le salarié et l’employeur, à l’issue de rencontres dédiées.
• Le montant de l’indemnité spécifique est fixé au moins au niveau de l’indemnité légale de licenciement.
• Une fois l’accord signé, l’administration doit valider la convention (via l’inspection du travail), assurant ainsi le respect des dispositions légales.
“La rupture conventionnelle garantit au salarié une indemnité de départ, ainsi que la possibilité, sous réserve de remplir certains critères, de percevoir l’aide au retour à l’emploi de France Travail.”
1.2. Pourquoi l’envisager pour une reconversion ?
Financer une transition professionnelle
Lorsqu’un projet de changement de métier est en gestation, le salarié peut avoir besoin de temps pour se former, chercher une nouvelle opportunité ou créer une entreprise. L’accès à l’indemnité chômage de France Travail est alors précieux, car il couvre une partie des dépenses quotidiennes pendant la reconversion.
Se séparer en bons termes
La rupture conventionnelle tend à limiter les tensions qui peuvent accompagner une démission ou un licenciement. C’est une issue négociée, qui évite de se retrouver en litige devant les prud’hommes ou de dégrader la relation avec l’employeur. Cela compte particulièrement si l’on a des contacts futurs possibles dans le même secteur d’activité ou pour ne pas perdre les avantages liés à l’ancienneté.
2. Préparer sa demande de rupture conventionnelle
2.1. Clarifier son projet de reconversion
Une démarche réfléchie
Avant d’initier la discussion avec l’employeur, il est conseillé d’avoir une vision claire de son projet professionnel : nature de la formation envisagée, secteur d’activité ciblé, date approximative de départ. Cette préparation renforce la crédibilité du salarié lorsqu’il expose sa volonté de quitter l’entreprise.
Quelques étapes préalables
• Réaliser un bilan de compétences pour évaluer ses aptitudes et confirmer l’orientation visée.
• Se renseigner sur les financements possibles (Compte Personnel de Formation, aides de France Travail, etc.).
• Estimer un calendrier (durée de formation, période de recherche d’emploi).
“Présenter un projet clair montre à l’employeur que la demande de rupture conventionnelle ne relève pas d’un simple caprice, mais d’une véritable réflexion aboutie.”
2.2. Choisir le bon moment pour en discuter
Saisir l’opportunité
Il est souvent judicieux de solliciter un entretien dédié avec sa hiérarchie (responsable RH ou supérieur direct) à un moment opportun : fin de mission, passage d’une étape clé dans l’entreprise, ou période plus calme.
Anticiper les réticences
• L’employeur peut se demander si la rupture conventionnelle ne va pas entraîner des frais inattendus (indemnités) ou perturber l’organisation.
• Prévoir des solutions de passation de dossier, former un collègue remplaçant, ou s’engager à respecter un calendrier précis peut rassurer l’employeur quant à la transition interne.
2.3. Se préparer aux négociations
La discussion autour du montant de l’indemnité de rupture, des dates de fin de contrat ou encore des modalités de départ peut parfois être sensible. Quelques clés :
- Connaître le seuil légal (indemnité légale de licenciement) pour éviter toute proposition en dessous du plancher.
- Estimer son ancienneté dans l’entreprise, facteur déterminant du montant.
- Mettre en avant sa contribution et son engagement pour obtenir, le cas échéant, une majoration d’indemnité.
3. Les étapes formelles de la rupture conventionnelle
3.1. L’entretien préalable
Une fois l’accord de principe obtenu, l’employeur et le salarié se rencontrent lors d’un (ou plusieurs) entretien(s) formel(s). C’est l’occasion de finaliser :
- Le motif de la rupture (reconversion, projet personnel, etc.)
- La date précise de fin de contrat
- Le montant de l’indemnité spécifique
- Les éventuelles clauses complémentaires (ex. clause de non-concurrence, délais de passation)
3.2. La signature de la convention et le délai de rétractation
Une fois qu’un terrain d’entente est trouvé, une convention écrite de rupture est rédigée. Elle reprend tous les éléments négociés. Les deux parties la signent, à une date donnée. S’ensuit un délai de rétractation de 15 jours calendaires au cours duquel le salarié ou l’employeur peut renoncer au projet sans justificatif.
Si personne ne se rétracte pendant ces 15 jours, la convention doit ensuite être transmise à l’autorité administrative (la DREETS ou direction régionale compétente) pour homologation.
3.3. L’homologation et la fin du contrat
L’administration dispose d’un délai (généralement 15 jours ouvrables) pour accepter ou refuser la convention. À l’issue, deux scénarios :
- Acceptation tacite ou expresse : la convention est validée, et la rupture du CDI intervient à la date convenue. Le salarié reçoit alors son indemnité et ses documents de fin de contrat (certificat de travail, attestation destinée à France Travail, etc.).
- Refus : si l’administration constate une anomalie (montant trop faible, vice de consentement…), la convention peut être annulée. Les deux parties doivent alors reprendre les négociations ou conserver le contrat de travail en l’état.
4. Les droits au chômage et la reconversion
4.1. L’inscription auprès de France Travail
Une fois le contrat rompu, l’ancien salarié peut s’inscrire rapidement auprès de France Travail pour faire valoir ses droits à l’allocation chômage (ARE). Les démarches consistent à fournir les justificatifs nécessaires : attestation d’employeur, dossier d’inscription, etc.
“Obtenir les allocations chômage permet de disposer d’un filet de sécurité financier pendant la reconversion, que ce soit pour suivre une formation, créer son entreprise ou rechercher un nouveau poste.”
4.2. Utiliser les dispositifs de formation
Le principal intérêt de la rupture conventionnelle dans le cadre d’une reconversion est de pouvoir mobiliser divers outils de formation, en étant demandeur d’emploi :
- Compte Personnel de Formation (CPF) pour financer, totalement ou partiellement, une formation qualifiante
- Aide à la formation (AIF) proposée par France Travail, sous réserve de validation du projet
- Possibilité de formations conventionnées, notamment dans les secteurs en tension (numérique, services à la personne, etc.)
4.3. Création d’entreprise ou reprise d’activité
Pour certains salariés, la reconversion signifie lancer un projet entrepreneurial. Dans ce cas, on peut solliciter deux formes d’aides de France Travail :
- Le maintien partiel de l’ARE pour disposer d’un revenu pendant la phase de création.
- L’ARCE (Aide à la Reprise ou à la Création d’Entreprise), qui verse une partie des droits sous forme de capital.
5. Gérer la transition en entreprise et après
5.1. L’importance de la passation de poste
Même si le salarié envisage un nouveau départ, il est dans son intérêt de préserver de bons rapports avec son employeur. Préparer un document de passation, former un collègue, ou rester disponible pour quelques questions après le départ peut permettre de partir en excellents termes.
“Un départ réussi se prépare. Montrer de la bienveillance et du professionnalisme facilite la suite, surtout si l’on souhaite conserver un réseau ou demander des recommandations.”
5.2. Tirer profit de l’accompagnement de France Travail
Une fois inscrit comme demandeur d’emploi, il est possible de bénéficier d’un accompagnement dans le cadre d’un Projet Personnalisé d’Accès à l’Emploi (PPAE). Un conseiller oriente le candidat vers des ateliers, des formations ou des outils de recherche (CV, lettres de motivation, simulation d’entretiens).
5.3. Évaluer les progrès et ajuster si besoin
Chaque reconversion est unique. Après la rupture conventionnelle, on découvre parfois que le métier visé ne correspond pas pleinement aux attentes ou qu’une formation plus longue est nécessaire. Rester ouvert aux ajustements fait partie intégrante de la réussite du projet.
FAQ
- 1. Un employeur peut-il refuser la rupture conventionnelle ?
Absolument. L’accord doit être mutuel. Le salarié n’a pas le droit d’exiger unilatéralement la rupture conventionnelle et l’employeur demeure libre d’accepter ou de refuser. En cas de refus, d’autres voies (démission, négociation supplémentaire) peuvent être envisagées. - 2. Quel montant d’indemnité peut être négocié ?
Le salarié ne peut pas percevoir moins que l’indemnité légale de licenciement, calculée en fonction de l’ancienneté et du salaire. Il est toutefois possible de négocier plus, selon les pratiques de l’entreprise, les responsabilités tenues ou la situation. La négociation se fait au cas par cas. - 3. La rupture conventionnelle donne-t-elle droit automatiquement aux allocations chômage ?
L’ARE peut être perçue si le salarié remplit les conditions d’affiliation (durée de travail suffisante). La rupture conventionnelle est éligible à l’indemnisation de France Travail, sous réserve de l’homologation par l’administration. Un différé de paiement s’applique souvent, tenant compte des indemnités de rupture. - 4. Combien de temps faut-il pour finaliser la rupture conventionnelle ?
Le processus peut prendre quelques semaines à plusieurs mois, selon la rapidité des négociations et les délais administratifs. Entre l’entretien initial, le délai de rétractation (15 jours), et l’homologation (15 jours ouvrables), il convient généralement de tabler sur un mois minimum. - 5. Qu’arrive-t-il si l’administration refuse l’homologation ?
La convention est alors caduque. Les deux parties doivent soit reprendre les discussions en corrigeant la source du refus (montant insuffisant, vice de consentement…), soit conserver le CDI en l’état ou envisager un autre mode de rupture. - 6. Un salarié peut-il demander une rupture conventionnelle alors qu’il est en arrêt maladie ?
Rien ne l’interdit formellement, mais il est souvent recommandé d’attendre la fin de l’arrêt pour clarifier la situation. Si le salarié est considéré inapte, d’autres dispositifs (inaptitude) peuvent s’appliquer. En tout état de cause, la libre négociation et la rencontre physique avec l’employeur demeurent essentielles. - 7. Comment éviter un litige sur la date de fin de contrat ?
Il est indispensable de mentionner clairement la date de rupture dans la convention. En cas de doute, inclure un planning explicite (dernier jour de travail, congés éventuels, etc.). Les deux parties doivent valider chaque point pour empêcher toute ambiguïté. - 8. La reconversion doit-elle être justifiée auprès de l’employeur ?
Officiellement, le salarié n’est pas tenu de détailler son projet. Cependant, présenter l’orientation (formation, création d’entreprise, etc.) peut faciliter l’acceptation et la compréhension mutuelle. - 9. Peut-on signer plusieurs ruptures conventionnelles avec le même employeur ?
Théoriquement oui, si un salarié est réembauché en CDI ultérieurement et que les deux parties conviennent d’une nouvelle rupture conventionnelle. C’est peu fréquent, mais aucun texte ne l’interdit, tant que toutes les règles légales sont respectées. - 10. Existe-t-il un âge limite pour prétendre à une rupture conventionnelle ?
Non. Le dispositif s’applique à tout salarié en CDI, sans condition d’âge. Les modalités d’indemnisation chômage peuvent toutefois être différentes après un certain âge, notamment en ce qui concerne la durée d’indemnisation. - 11. Comment s’assurer d’être indemnisé au plus vite par France Travail ?
Il faut s’inscrire rapidement et fournir un dossier complet (attestation d’employeur, pièce d’identité, RIB, etc.). Les droits à l’ARE sont calculés à partir de la date d’inscription, mais un différé d’indemnisation (liés aux congés payés et à l’indemnité de rupture) s’applique généralement. - 12. Que faire si l’employeur impose un “solde tout compte” inférieur au minimum légal ?
Le salarié peut refuser de signer ou de viser le document, et saisir les représentants du personnel ou, si nécessaire, la justice prud’homale. Les indemnités fixées par la loi sont d’ordre public, aucune clause de la convention ne peut les diminuer en deçà du seuil légal.